Lettre ouverte ACAT France - ADDE - AMNESTY International - ANAFE - CIMADE - GISTI - LDH - MRAP - Syndicat des avocats de France (SAF) - Syndicat de la Magistrature (SM) Objet : la France condamnée par la Cour européenne des droits de l'Homme parce qu'elle ne respecte pas ses obligations en matière de droit à des recours suspensifs. Monsieur le ministre, Vous vous êtes rendu samedi à la zone d'attente des personnes en instance (ZAPI) de l'aéroport Charles de Gaulle de Roissy. Nous nous réjouissons de l'intérêt que vous manifestez ainsi pour les lieux où des étrangers sont maintenus dans l'attente d'être admis sur le territoire français, ou, ce qui est plus souvent le cas, d'être refoulés. Il se trouve justement que, le 26 avril 2007, dans une décision rendue à l'unanimité, la Cour européenne des droits de l'homme (CEDH) a condamné la France pour la façon dont elle renvoie les étrangers menacés dans leur pays d'origine, en exigeant que les personnes susceptibles de voir leur vie ou leur intégrité menacée aient "accès à un recours de plein droit suspensif" . Si la France est aujourd'hui condamnée par la CEDH concernant la procédure d'asile à la frontière, considérablement durcie ces dernières années, cette condamnation va bien au-delà. En effet, la France ne peut plus continuer à violer comme elle le fait les droits fondamentaux inscrits dans la Convention européenne des droits de l'homme qu'elle a ratifiée, tels que le droit à la vie (article 2 de la Convention), le droit à ne pas subir de tortures ou de traitements inhumains ou dégradants (article 3), mais également le droit au respect de la vie privée et familiale (article 8). Depuis maintenant une quinzaine de jours, des juges des libertés et de la détention du Tribunal de grande instance de Bobigny et de Créteil (compétents pour l'aéroport de Roissy et d'Orly et leurs zones d'attente) tirent les conséquences de l'arrêt de la Cour européenne : ils constatent que la législation française n'est pas conforme et refusent de voir violée plus longtemps la Convention européenne. Ils rejettent donc les demandes de prolongation de maintien en zone d'attente et les étrangers demandeurs d'asile qui comparaissent devant eux sont admis sur le territoire français afin que leur demande de protection soit examinée selon la procédure normale. Pour autant, la France continue de violer de façon délibérée et répétée la Convention européenne, en s'empressant de renvoyer les demandeurs d'asile d'où ils viennent avant qu'ils ne passent devant le juge -parfois avant même leur placement en zone d'attente (à la suite de contrôles dits "passerelles")-, en éloignant des étrangers malades ou ceux invoquant des menaces, avant toute décision juridictionnelle. L'arrêt de la CEDH a trouvé un écho mercredi 11 mai dernier avec une nouvelle condamnation de la France,celle du Comité contre la torture des Nations Unies cette fois, pour violation de l'article 3 de la Convention contre la torture des Nations Unies qui interdit à tout Etat partie de renvoyer une personne vers un pays où elle risque la torture. Aujourd'hui, la France est donc dans l'obligation urgente de modifier sa législation et ses pratiques, et d'offrir un recours automatiquement suspensif devant le juge à tout étranger susceptible de voir sa vie, sa liberté, son intégrité physique et mentale, ou sa santé menacée à la suite d'un refus d'entrée et de séjour en France, d'une expulsion ou d'une interdiction du territoire. Or, à ce jour, en droit français, seules les procédures concernant la reconduite à la frontière et l'obligation de quitter le territoire français respectent ce principe, du moins en métropole. Tel n'est pas le cas pour les refus d'entrée avec renvoi dans le pays de provenance, les refus de séjour au titre de l'asile, les arrêtés de réadmission Dublin II dans un autre Etat membre de l'Union européenne, les arrêtés d'expulsion, ni pour les décisions fixant le pays de renvoi (presque toujours celui dont l'étranger a la nationalité) après une interdiction du territoire ou autre mesure d'éloignement. Les organisations signataires demandent donc que cessent immédiatement les mesures de refoulement et d'éloignement d'étrangers tant qu'un juge ne s'est pas prononcé sur leur bien fondé et que soit adoptée une modification législative qui instaure un recours de plein droit suspensif sur l'ensemble des mesures d'éloignement. ACAT France ADDE AMNESTY International ANAFE CIMADE GISTI LDH MRAP SAF Syndicat de la Magistrature (SM) Paris, le 22 mai 2007 |
Immigration : Lettre ouverte à Brice Hortefeux, ministre de l'immigration
Inscription à :
Publier les commentaires (Atom)
0 commentaires:
Enregistrer un commentaire